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portraits d'athlètes 

carousel des disciplines

Les destins de ces sept athlètes pourraient apparaître comme une simple déclinaison de l’histoire du sport à l’échelle des individus, mais ils s'avèrent en réalité particulièrement emblématiques de l’évolution des sociétés.

Les disciplines pratiquées et les choix de clubs renvoient aux cultures sportives nationales, aux origines sociales, aux niveaux d'études, aux trajectoires professionnelles, mais aussi aux engagements politiques ces sportifs et de ces sportives européens.
Majoritairement Juifs, ils n'ont, pour la plupart d'entre eux, véritablement pris conscience de leur judéité que sous l’effet de l’antisémitisme et de la barbarie nazie. Certains sont épargnés, quelque temps, comme les boxeurs d'Auschwitz. Pour d'autres, en revanche, leur statut d'athlètes d'exception leur vaut d'être atrocement suppliciés.  Rares sont ceux qui ont survécu, encore plus rares ceux qui ont poursuivi leur carrière sportive. Souvent, ils ont dû émigrer loin de l’Europe, aux états-Unis, en Palestine sous mandat britannique où ils vont contribuer à la naissance de l’état d'Israël en 1948.
Leur histoire a longtemps été oubliée. Elle a resurgi depuis les années 1980. Elle a désormais sa place au sein de l’Histoire européenne.

Gretel Bergmann (1914 - ), athlétisme

Exclue de son club d'athlétisme peu après l’arrivée d'Hitler au pouvoir, Gretel Bergmann émigre à Londres où elle devient une championne britannique de saut en hauteur au printemps 1934. Quelques mois plus tard, elle est invitée à rentrer en Allemagne pour s'entraîner en vue des Jeux de Berlin 1936. Par ce geste, le régime nazi essaie de désamorcer le boycott des Jeux Olympiques et de donner l’image d'une nation pacifique qui ne discrimine pas les Juifs. En application du « paragraphe aryen », Gretel Bergmann ne peut alors qu'intégrer un club sportif juif. Bien que détentrice du record d'Allemagne de saut en hauteur avec 1,60 mètre, elle est écartée la sélection allemande sous prétexte de « performances insuffisantes». l’annonce de sa non-sélection, officiellement « pour cause de blessure », est rendue publique alors que les athlètes américains ont déjà embarqué sur leur paquebot. Gretel Bergmann s'exile alors aux Etats-Unis où elle devient championne de saut en hauteur en 1937 et 1938.

Légende de la photo:
La championne de saut en hauteur Gretel Bergmann au Championnat sportif du Reichsbund jüdischer Frontsoldaten (RJF, Association sportive des vétérans juifs d'Allemagne) sur le terrain de sport de la communauté sportive de Berlin-Grünewald.
Berlin, Allemagne, juillet 1936.
© Bildarchiv Pisarek/akg-images.
Victor « Young » Perez (1911-1945), boxe anglaise

Né à Tunis, Perez apprend la boxe avec son frère et adopte « Young » comme nom de combat. Il s'installe à Paris où il devient champion du monde poids mouches au mois d'octobre 1931 en mettant KO l’Américain Frankie Genaro au 2eme round. C'est aux points qu'il perd son dernier combat officiel, à Paris, le 7 décembre 1938. Arrêté à Paris, le 18 juin 1943, pour défaut de port de l’étoile, il est interné à Drancy puis déporté vers Auschwitz le 7 octobre 1943. Sélectionné pour le travail, il est affecté au camp d'Auschwitz-III-Monowitz, où il se fait connaître comme ancien champion. Ses gardiens organisent alors un combat contre un poids lourd allemand qui vise à démontrer la supériorité du combattant « aryen ». Le match est interrompu par les gardes SS pour éviter la victoire de Perez qui est envoyé dans les kommandos de travail en représailles. Le 18 janvier 1945, il entreprend avec des milliers d'autres détenus les marches de la mort. Quatre jours plus tard, il est abattu par un garde allemand d'une rafale de mitraille.

Légende de la photo:
Portrait dédicacé du boxeur Young Perez.
Coll. Musée national du Sport, Paris.
Ilona Elek (1907-1988), Helene Mayer (1910-1953), Ellen Preis (1912-2007), Escrime

Au regard des lois nazies de Nuremberg, ce sont trois « demi-juives » (Mischlinge), qui occupent le podium olympique du fleuret féminin à Berlin en 1936. Il en est une, qui retient l’attention de tous : la médaillée d'argent Helene Mayer qui fait le salut nazi. D'origine juive par son père, un médecin réputé et patriote, elle bénéficie d'une grande popularité en Allemagne depuis sa victoire aux jeux d'Amsterdam en 1928 à l’âge de 17 ans. C'est en Californie, où elle est restée étudier le droit après les Jeux de Los Angeles, qu'elle apprend en 1933 sa radiation du club d'Offenbach. Incarnation de la parfaite « aryenne » pour les nazis, se considérant elle-même comme Allemande, elle répond favorablement à l’invitation d'Hitler de participer aux Jeux de Berlin. Son ambition sportive et sa naïveté politique, davantage que la crainte de représailles pour sa famille, en font la caution du régime nazi et de tous les adversaires du boycott. Elle poursuit sa carrière aux Etats-Unis avant de revenir vivre en Allemagne de l’Ouest après la guerre.

Légende de la photo:
Le podium d'escrime féminin aux Jeux Olympiques de Berlin.
Allemagne, 1936.
De gauche à droite : l’Autrichienne Ellen Preis, médaillée de bronze, la Hongroise Ilona Schacherer-Elek, médaillée d'or et l’Allemande Helene Mayer, médaillée d'argent.
© Bettmann /Corbis
Matthias Sindelar (1903-1939), football

Fils d'immigrés tchécoslovaques d'origine juive, Sindelar est surnommé « le Mozart du football » il contribue à faire de l’Austria Vienne la « Wunderteam » (équipe miracle) qui domine le football européen des années 1930. En 1938, l’annexion de l’Autriche au Reich sonne le glas du football autrichien. La Wunderteam est dissoute et ses meilleurs joueurs invités à intégrer la Mannschaft, l’équipe allemande. Sindelar, prétextant de vieilles blessures à son genou, refuse de jouer sous les couleurs nazies. Dans le dernier match organisé pour fêter l’Anschluss, il marque l’un des deux buts victorieux. Au terme de la rencontre, Sindelar sera le seul joueur, avec Karl Sesta, à ne pas faire le salut hitlérien. Sa désobéissance civile fera de lui un symbole de la résistance sportive au nazisme. Quelques mois plus tard, le 23 janvier 1939, Matthias Sindelar est trouvé mort asphyxié dans son appartement. Plus de 15 000 personnes accompagnent sa dépouille dans les rues de Vienne, le jour de ses funérailles.

Légende de la photo:
Le footballeur autrichien Matthias Sindelar (à gauche) lors de la rencontre entre l’équipe autrichienne et l’équipe allemande.
Autriche, 1938.
© D.R.
Alfred Flatow (1869-1942) et Gustav Felix Flatow (1875-1944), Gymnastique

Né à Dantzig, Alfred est déporté en octobre 1942 depuis Berlin. Il décède deux mois plus tard. Né à Berent en Poméranie, Gustav est arrêté en 1943 aux Pays-Bas où il avait trouvé refuge. Il est interné dans le camp de transit de Westerbork avant d'être transféré à Theresienstadt en février 1944. Il y meurt en décembre de la même année.

En 1896, lors des premiers Jeux Olympiques modernes à Athènes, ces deux spécialistes de barres parallèles et de barre fixe avaient très largement contribué au succès de l’équipe allemande de gymnastique. Avec trois médailles d'or et une médaille d'argent, Alfred est d'ailleurs l’un des athlètes les plus titrés du moment. En 1903, il quitte le Berliner Turnerschaft pour fonder avec d'autres le Judische Turnerschaft, la fédération juive de gymnastique en Allemagne. En 1997, la ville de Berlin honore leur mémoire en rebaptisant Flatowallee l’ancienne Reichssportsfeld Strasse. Par ailleurs, la Poste allemande émet un timbre à leur effigie.

Légende de la photo:
Alfred Flatow lors de l’épreuve de barres parallèles, au cours de laquelle il remporte la médaille d'or.
Athènes, Grèce, 6-14 avril 1896.
© akg-images.
Alfred Nakache (1915-1983), Natation

Né en Constantine en 1915, Alfred Nakache devient, dans les années 30, une figure emblématique de la natation française. A plusieurs reprises champion de France, il poursuit cette ascension sportive jusqu'à l’été 1942. Le régime du Maréchal Pétain, tout en adoptant une législation antisémite qui fait des Juifs de France des citoyens de seconde zone, autorise Alfred Nakache à nager pour défendre les couleurs nationales. Mais le paradoxe ne dure pas : cible d'attaques antisémites, le champion ne peut participer aux championnats de France en 1943. Il est déporté à Auschwitz en janvier 1944 avec sa femme Paule et sa fille Annie, assassinées dès leur arrivée. Il devient le « nageur d'Auschwitz » après avoir effectué sous la contrainte d'un garde SS ou comme acte de bravoure et de dignité des mouvements dans un bassin de rétention d'eau. Si ce surnom témoigne d'un épisode particulièrement tragique de la vie du nageur, ses performances sportives font de lui un champion français d'exception.

Légende de la photo:
Alfred Nakache (à gauche), vainqueur du 200 m nage libre au championnat de France.
Piscine des tourelles, Paris, 28 août 1938.
Coll. Musée national du Sport, Paris.
Alojzy « Alex » Ehrlich (1914-1992), tennis de table

Né le 1er janvier 1919 à Komancza, dans un village des Carpates en Pologne, Alex Ehrlich débute sa carrière de pongiste au Hasmonea Lwow, club omnisports créé en 1908 où se retrouvent les sportifs juifs. Il connait une carrière fulgurante. A trois reprises, aux championnats du monde de Prague (1936), de Baden (1937) et du Caire (1939), il est médaillé d'argent. Lors d'un légendaire Pologne-Roumanie à Prague, Alex Ehrlich, ambidextre, s'oppose à Farkas Paneth, champion juif originaire de Cluj, pendant 2 h 15 pour marquer. un seul point. La guerre interrompt et bouleverse une carrière prometteuse à bien des égards. Alex Ehrlich est arrêté en juin 1944 à Bourbon-l’Archambault alors qu'il apportait son aide aux réseaux de résistance. Il est déporté à Auschwitz puis à Dachau. De retour des camps, alors que ses parents restés à Lwow ont été assassinés, Alex Ehrlich s'installe définitivement à Paris, intègre l’équipe de France et devient, un entraîneur de renommée internationale.

Légende de la photo:
Alex Ehrlich (1914 - 1992)
Joueur de tennis de table d'origine polonaise, triple médaillé d'argent aux championnats du monde dans les années 1930. Déporté à Auschwitz, il s'installe en France à son retour des camps et devient un entraîneur de renommée internationale.
Coll. Musée national du Sport, Paris.

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quizz  Au regard des lois raciales de Nuremberg, comment sont considérées les trois médaillées olympiques de fleuret?
comme des "demi-juives" (Mischlinge)   comme des "aryennes"